Les actualités des Oursins

Message de Marjorie, ancienne bénéficiaire de la Delépine Foundation et aujourd’hui Coordinatrice des Projets

Ce message, c’est Marjorie qui vous l’écrit ! Beaucoup d’entre vous me connaissent, car je suis présente dans la vie de la fondation depuis plus de 24 ans. J’ai 36 ans depuis quelques jours ! En quelques mots, je suis une ancienne bénéficiaire des Oursins-Enfants des trottoirs / Delépine Foundation et, depuis plusieurs années, je suis coordinatrice des projets de la fondation. Avec Ate Aurora, j’ai co-créé la société Liwayway, entreprise équitable et solidaire, dont les bénéfices sont versés à la fondation.

Nous venons de célébrer l’ouverture de « Mirasol » un nouveau centre, une grande et magnifique ludothèque qui va accueillir plus de 1.000 enfants, moyens et grands, issus des bidonvilles alentour. Un moment toujours émouvant pour moi, évidemment, car cela me rappelle, avec autant de larmes que de joie, tous mes souvenirs depuis mon arrivée dans une autre ludothèque, « Blue Bahay », la maison bleue. C’était il y a 24 ans ! C’est un moment émouvant aussi, car je vois à quel point Ate Aurora se mobilise toujours avec force et espoir pour que ces centres aboutissent à 100%.

 

Je vous écris aujourd’hui pour la première fois, car j’entends que les dons personnels ont considérablement diminué. Et j’avoue que je ne comprends pas. Beaucoup de personnes ne semblent plus lire les e-mails de la fondation. Nous recevons tellement peu de retours. Alors, je me suis demandé comment je pouvais aider Ate Aurora.

Peut-être qu’un message venant des premiers concernés, c’est-à-dire une enfant de la fondation, pourrait faire la différence ? Pourquoi pas moi ? Depuis plusieurs années, je comprends mieux les difficultés des ONG humanitaires. Longtemps j’ai pensé que le plus grand défi était la construction des projets et leur gestion. Mais au final, pas du tout ! Ate Aurora m’a toujours dit que même les meilleurs projets n’existent pas sans audience. Aujourd’hui, je comprends ce qu’elle voulait dire. Comment vous exprimer avec tendresse et affection à quel point elle a besoin de vous et, nous, les enfants de la rue et des bidonvilles, nous avons besoin de vous et de chacun de vos dons ?

Même si nous avons déjà réussi beaucoup de choses, même si la fondation a reçu des prix et des reconnaissances, il faut continuer sur le terrain et donc obtenir de vous cette aide si essentielle. Dites-moi ce que je peux vous dire pour vous convaincre de faire un don ou de reprendre un parrainage ? C’est bien sûr difficile de comprendre pourquoi les dons personnels diminuent, alors que la fondation et l’engagement d’Ate Aurora ont changé des milliers de vies, comme la mienne, depuis 30 ans ! Je suis touchée que des personnes de l’autre bout du monde soutiennent des enfants des Philippines. Je suis évidemment heureuse de voir que des fondations d’entreprises nous aident de plus en plus, vu l’excellence des programmes et des projets. Mais alors, vous qui lisez nos courriels, voyez les vidéos de la fondation, pourquoi ne partagez-vous pas notre projet, pourquoi ne lancez-vous pas une belle chaîne de solidarité pour ce 30ème anniversaire ? Je me doute que le quotidien vous accapare. Que devenez-vous, vous, anciens volontaires, visiteurs, amis des Oursins, vous qui avez vu sur place à quel point la fondation changeait nos vies au quotidien ? Enfant, je vous ai rencontrés et admirés. Nous avons pleuré ensemble à chaque départ, avec l’espoir de vous revoir. Ate Aurora nous rassurait en nous disant que vous ne nous oublieriez pas, et cela nous consolait. Je garde des souvenirs merveilleux de chacun d’entre vous et je vous demande aujourd’hui de vous souvenir de celle qui est à l’origine de tout cela : pour cette porte qu’elle nous ouvre à tous, à nous les enfants des bidonvilles et des rues, mais aussi à vous qui avez eu le privilège de partager nos vies d’enfants bousculées. Car combien d’entre vous, volontaires, amis ont atterri chez Ate Aurora et Kuya Damien qui ont ajouté un couvert ou un lit à leur domicile privé pour un WE, des semaines ou des mois ? Je sais que peu de gens le font. Nous-même Philippins qui sommes très accueillants, séparons toujours nos relations de travail et personnelles.

Mais Ate Aurora et Kuya Damien ne disent jamais non, et leur porte est toujours ouverte : nous avons vécu à plus de 25 enfants chez eux ! Celle qui a décidé un jour que nous existions, nous, enfants de 3e zone, et que nos droits d’enfants devaient être respectés fête ses 30 ans de carrière humanitaire. Je me demande souvent ce qui la motive. Je la vois douter quand les comptes de la fondation sont vides, et puis, un passage à la fondation, un sourire d’un de nous, et tout repart. Je ne peux évidemment pas me permettre de présumer de vos ressources financières, je ne le ferais pas. Mais je me dis que même un petit don serait fantastique et lui donnerait l’espoir qu’elle passe son temps à distribuer depuis 30 ans. Comme moi, d’autres enfants ont besoin de cet horizon nouveau qui m’a été offert en passant la porte d’un centre de la fondation. Je sais qu’elle ne va pas s’arrêter, car si elle avait dû le faire, elle l’aurait fait depuis longtemps face à toutes les embûches.

Alors, au titre de fille de cœur, je me dois d’être son relais. Au nom des autres enfants de la fondation, je fais appel à vous. Aidez-moi, s’il vous plaît ! Mille mercis à vous. Et si vous ne souhaitez pas financer, faites-nous un signe avec un mot ou une photo, un souvenir de vous, un souvenir de la fondation. Cela nous offrira, comme dit Ata Aurora, une belle énergie pour affronter les difficultés à venir et un magnifique geste pour les 30 ans de son engagement humanitaire.

Veuillez trouver ci-dessous mon discours lors de l’inauguration de Mirasol, dernière ludothèque créée. Vous le trouverez également en français.

Merci à vous tous, au nom de nous, enfants des Philippines qui avons croisé le chemin de la Delépine foundation.

Marjorie De Los Reyes
Project coordinator & Liwayway co-founder

 

Collecte pour les 30 ans d’engagement humanitaire

Parrainage

Discours de Marjorie De Los Reyes

Inauguration de la Ludothèque du Lycée Public de Santa Cruz

Bonjour à toutes et à tous,

Pour ceux qui ne me connaissent pas encore, je suis Marjorie De Los Reyes, coordinatrice des Oursins, cofondatrice de la marque Liwayway, et fille de cœur d’Aurore et Damien.
Un immense merci à chacun d’entre vous d’être ici aujourd’hui !
Merci d’avoir pris le temps, d’avoir affronté le trafic, d’avoir parcouru des kilomètres depuis Manille pour nous rejoindre. Votre présence est une marque de soutien qui nous touche profondément et que nous garderons précieusement dans nos cœurs.
Aujourd’hui, nous célébrons l’ouverture d’un centre de plus, réalisé grâce à la Fondation Delepine. Une fondation qui, depuis 30 ans, œuvre pour un droit fondamental souvent oublié : le droit de jouer.
Cela semble évident, n’est-ce pas ? Et pourtant…

Le jeu, point de départ de toute vie

Notre vie commence par l’éveil et le jeu. Dès nos premiers jours, nous découvrons le monde à travers nos sens, nos gestes, nos interactions. Nous attrapons des objets, nous imitons, nous explorons.
C’est ainsi que nous nous développons. Le jeu n’est pas un passe-temps, c’est notre premier langage, notre première école.
À la fondation, nous avons un adage :
« Dis-moi comment il joue, je te dirai comment il va. »
Parce que le jeu révèle tout : la curiosité, la créativité, la confiance en soi, la capacité à interagir avec les autres.
Mais alors, que se passe-t-il quand un enfant ne joue pas ? Quand il n’a pas accès à cet espace d’exploration et d’apprentissage ?

Un droit oublié

Quand on parle d’enfants en situation de pauvreté ou de grande détresse, nos premières pensées vont toujours à des besoins essentiels :
Avoir à manger
Être soigné
Aller à l’école
Avoir un toit sécurisé
Mais le jeu, lui, est souvent oublié. Comme si jouer était un luxe. Comme si les enfants pauvres n’avaient pas besoin de rêver, d’explorer, de créer.

On entend souvent : « Ces enfants jouent avec deux bouts de bois ! Ils n’ont besoin de rien d’autre ! »
Mais pourquoi cette différence ?

Quand on regarde la vie d’un enfant issu d’un milieu plus favorisé, sa liste de besoins et d’expériences est bien plus longue :
Une alimentation équilibrée
Un suivi médical complet (dentiste, lunettes, etc.)
Une éducation de qualité avec des activités extrascolaires
Du sport, des loisirs, des cours particuliers
Des vacances, des sorties culturelles, des voyages
Des bibliothèques, des ordinateurs, un accès à Internet
Des fêtes d’anniversaire, des Noëls, des moments de partage en famille
Alors, dites-moi : pourquoi un enfant pauvre devrait-il se contenter de si peu ?
L’espoir, c’est plus qu’un repas

Je le sais, parce que j’ai été cet enfant.

Et je peux vous dire une chose : tous les enfants ont les mêmes rêves, mais pas les mêmes espoirs.

Le jour où j’ai franchi la porte d’un centre de la fondation, ce n’est pas seulement un accès au jeu que l’on m’a offert. On m’a offert l’espoir.
Découvrir le monde à travers le jeu, visiter un musée, voir un film au cinéma… tout cela m’a appris que l’univers ne se limitait pas à mon quotidien.
Espoir, c’est croire que tout est possible.

Le jeu, une porte ouverte sur le monde
Le jeu, ce n’est pas seulement une distraction. C’est un passeport vers d’autres univers.
Jouer, c’est découvrir de nouvelles idées, explorer des cultures différentes, apprendre des histoires que l’on n’aurait jamais entendues autrement.
Un enfant qui joue avec un puzzle développe sa logique.
Un enfant qui joue à un jeu de rôle apprend l’empathie et la communication.
Un enfant qui écoute une histoire ou regarde un film découvre d’autres manières de penser, d’autres horizons.
Le jeu nous expose au monde. Il nous permet d’acquérir des expériences que nous n’aurions jamais pu imaginer.

Quand on naît dans la pauvreté, un pan entier du monde nous est fermé :
Le sport, l’art, la musique
Les jeux de réflexion et d’apprentissage
Les sorties culturelles, les loisirs
La découverte de nouvelles passions
Dans mon entourage, les seuls jeux auxquels nos parents jouaient… c’étaient les jeux d’argent. Parce qu’on nous a laissé croire que l’unique espoir qu’on pouvait se permettre, c’était un coup de chance.

Et pourtant…

J’ai été une excellente élève, lauréate de nombreux prix, et même valedictorian. Alors, certains pourraient dire que je n’avais pas besoin d’un centre comme celui-ci.
Mais réussir à l’école ne suffit pas. Pour s’épanouir, pour se démarquer, pour devenir un adulte accompli, il faut plus. Il faut des expériences, des rencontres, des découvertes.

Un lieu qui change des vies

Aujourd’hui, avec cette ludothèque, nous ouvrons une nouvelle porte.
Un espace où les enfants pourront apprendre, s’amuser, rêver, grandir autrement. Un lieu où l’on plante des graines d’espoir.
Merci à la Fondation Delepine, merci à tous ceux qui ont rendu ce projet possible. Grâce à vous, les enfants de Santa Cruz auront le droit de jouer, le droit d’apprendre, et donc, le droit d’espérer.
Merci.